CP | Cinq recommandations phares pour les Assemblées Générales 2017
Alors que la saison des AG 2017 s’ouvre dans quelques jours, les investisseurs ont déjà fait part de leurs principales attentes dans un environnement réglementaire en évolution – adoption par le Parlement européen de la mise à jour de la Directive Droit des Actionnaires et publication du décret d’application de la loi Sapin 2 relatif à la rémunération des dirigeant·e·s – et un contexte politique, social et économique incertain. Désireux dès lors d’engager les entreprises dans une dynamique de durabilité à long terme, les grands fonds – en France et à l’international – seront particulièrement attentifs cette année à leurs engagements climat – et plus largement leur positionnement face au défi de la transition énergétique et écologique –, à la composition des Conseils, à la gestion des talents et à l’alignement des politiques de rémunérations des dirigeant·e·s avec les performances globales et les politiques de rémunérations internes.
Créé en 2005, le Grand Prix de l’Assemblée Générale est un think tank fondateur de l’Institut du Capitalisme Responsable, car l’AG implique que les entreprises se présentent de manière synthétique, pédagogique et lisible à l’ensemble de leurs parties prenantes, en privilégiant la prospective et la pertinence des informations délivrées.
Caroline de La Marnierre, Directrice Générale et Fondatrice de l’Institut du Capitalisme Responsable
Les Assemblées Générales évoluent et reflètent de manière croissante les attentes de la société civile vis-à-vis du secteur privé. L’AG est devenu un lieu de dialogue entre l’entreprise et ses actionnaires, mais aussi avec l’ensemble de ses parties prenantes.
Nicole Notat, Présidente et Fondatrice de Vigeo-Eiris, co-Présidente du Jury du Grand Prix de l’AG
Réunis en février en présence des deux co-président·e·s du Jury – Nicole Notat, Présidente de Vigeo-Eiris, et Benoît Potier, Président-Directeur Général d’Air Liquide, société lauréate du Grand Prix de l’AG du CAC 40 2016 – et du Grand Témoin du Jury – Bertrand Dumazy, Président-Directeur Général d’Edenred, société lauréate du Trophée du SBF 80 2016 – à l’occasion de la réunion de lancement du Grand Prix de l’AG 2017, les 27 membres du Jury attirent l’attention des dirigeant·e·s des entreprises cotées sur cinq axes prioritaires pour préparer leur AG.
Ces recommandations ont été adressées au début du mois de mars aux dirigeant·e·s des sociétés concourant pour le Grand Prix de l’AG 2017 (CAC 40 + 20 entreprises sélectionnées au sein du SBF 80). Elles serviront de guide à l’évaluation des Assemblées Générales réalisée par les consultant·e·s de CAPITALCOM, en partenariat avec les étudiant·e·s de l’ESSEC Business School et de la Sorbonne, et à la délibération du Jury.
1/ Communiquer sur l’appréhension des principaux risques et opportunités impactant la stratégie et la performance de l’entreprise
Dans un contexte de mutations profondes aux plans économique / financier, environnemental, social, sociétal et politique, les actionnaires attendent des entreprises qu’elles fassent preuve d’une transparence accrue et de pédagogie sur i) les risques et opportunités qui se présentent à elles, ii) les moyens mis en œuvre pour anticiper et gérer ces risques, iii) les dispositifs déployés pour sensibiliser le management intermédiaire, le Conseil et l’ensemble du corps social, à ces questions. Cette démarche entre en résonnance avec le concept de « pensée intégrée » ou integrated thinking, qui privilégie une approche prospective et stratégique, particulièrement lisible et pertinente. Le Jury propose donc aux entreprises de mettre en exergue leur capacité à favoriser l’adhésion individuelle et collective aux valeurs de l’entreprise et à son projet stratégique.
À titre d’exemple, lors de l’AG Legrand, société lauréate du Trophée de la RSE en 2016, Gilles Schnepp, Président-Directeur Général, a détaillé le dispositif de gestion des risques – accompagné d’un clip vidéo pédagogique – et les travaux du Comité des risques.
2/ Valoriser la complémentarité et la diversité des expériences / compétences des membres du Conseil d’Administration / de Surveillance pour faire face aux enjeux de l’entreprise
Le rapport annuel 2016 de l’AMF sur le gouvernement d’entreprise et la rémunération des dirigeant·e·s a notamment souligné les efforts considérables des entreprises en faveur de la diversification (âge, genre, nationalité, expérience, etc.) de la composition des Conseils du SBF 120. Le Jury du Grand Prix de l’AG a – en parallèle – observé une évolution qualitative dans le discours sur la gouvernance lors des dernières saisons des AG, qui valorise de manière croissante le rôle stratégique et les missions du Conseil, en complément de la compliance. Le Jury incite ainsi les entreprises à poursuivre cette dynamique en mettant en exergue la cohérence de leur Conseil, en lien avec les enjeux de l’entreprise.
Au cours de l’AG de Capgemini – société lauréate du Prix de la Gouvernance en 2016 – le Président du Comité Éthique et Gouvernance a présenté – de manière très pédagogique – le processus d’évaluation du Conseil, les résolutions relatives à la nomination de nouveaux administrateur·rice·s et les évolutions de la composition du Conseil.
3/ Mettre en perspective la politique de rémunération des dirigeant·e·s avec la performance financière / extra-financière et la politique interne de rémunération
Après les deux rejets de résolutions du Say on Pay en France en 2016, le législateur a renforcé – à travers la loi Sapin II – le pouvoir des actionnaires, puisque le vote deviendra contraignant à partir des AG 2017 (sous réserve de la publication des décrets dans les prochaines semaines). En outre, le niveau de rémunérations des dirigeant·e·s continue de cristalliser certaines revendications dans un contexte d’accroissement des inégalités de revenus au niveau mondial. La montée en puissance du concept de ratio d’équité dans le monde anglo-saxon – aux États-Unis dans le cadre de la loi Dodd-Franck à partir de 2018 (en cours de révision), pour les exercices clos 2017, et au Royaume-Uni suite aux prises de position de Theresa May (nuancées depuis) – témoigne ainsi des préoccupations de la société civile et de certains investisseurs. Le Jury invite donc les entreprises à adresser cette thématique en Assemblée Générale de façon globale, c’est-à-dire en mettant en perspective l’évolution de la politique de rémunération de leurs dirigeant·e·s avec la performance financière / extra-financière et la politique interne de rémunération.
Le Président du Comité des Rémunérations du Conseil d’Air Liquide – société lauréate du Grand Prix de l’AG 2016 – a détaillé la politique de rémunération des dirigeants et valorisé l’alignement de ces rémunérations avec la performance globale du Groupe.
4/ Qualifier l’impact de la transition énergétique et écologique sur les activités de l’entreprise
Après une saison des AG 2016 marquée par l’intégration croissante de la RSE à tous les niveaux de l’Assemblée Générale – et par un fort accent mis sur la mobilisation des entreprises dans le cadre de la COP21 – les actionnaires sont particulièrement sensibilisés aux thématiques liées au changement climatique. La publication – fin 2015 – du décret d’application de l’article 173 de la Loi relative à la transition énergétique conduit également les investisseurs à se mobiliser sur ces enjeux en leur imposant plus de transparence sur l’empreinte carbone de leurs portefeuilles. Le Jury appelle donc les entreprises à qualifier de manière très précise l’impact de la transition énergétique et écologique sur leur business model.
À titre d’exemple, AXA – qui a remporté le Prix Spécial du Jury « Démocratie actionnariale » – a mis en lumière, pendant son AG, des réalisations concrètes en matière de RSE, comme i) le désinvestissement dans les entreprises les plus impliquées dans les activités liées au charbon, ou encore ii) la publication d’une empreinte carbone 2015 de ses portefeuilles.
5/ Présenter – de façon détaillée – le dialogue avec les parties prenantes
Les entreprises multiplient les démarches de dialogue régulier avec leurs parties prenantes : réalisation de matrices de matérialité (34 au sein du CAC 40 en 2016 vs. 3 en 2011), mise en place de panels de parties prenantes, consultations, etc. De la même façon, les Assemblées Générales s’ouvrent de manière croissante à leur écosystème, et accueillent des publics diversifiés (actionnaires individuels, mais également ONG, associations, journalistes, salarié·e·s, etc.). Dans cette dynamique de structuration globale du dialogue avec les parties prenantes, le Jury invite les entreprises à présenter – de façon détaillée – les modalités d’échanges, ainsi que les conclusions qui en découlent, telles que les matrices de matérialité.
Edenred – société lauréate du Trophée du SBF 120 – a présenté lors de son AG son dispositif de relations avec ses parties prenantes, et notamment avec ses collaborateur·rice·s à travers le programme de reconnaissance « Les EWARDS ».