Préface | François Villeroy de Galhau
La crise sanitaire du COVID-19 a bouleversé nos économies. Elle a aussi démontré que l’Europe – et l’Eurosystème en première ligne – sait relever le défi de la responsabilité afin de préserver son modèle social et environnemental.
Face à cette crise sans précédent, et totalement imprévisible, des réponses rapides, fortes et convergentes ont partout été apportées pour endiguer les effets d’un choc économique sévère. Les leçons de 2008 ont été retenues. Rarement le consensus n’a été aussi fort sur le sens et l’ampleur des mesures à prendre. En Europe, nous avons ainsi construit un bouclier pour protéger les entreprises de toute taille et les aider à traverser ce choc, ce qui protège aussi leurs salariés. C’est la traduction de notre modèle social. Les États-Unis, à l’inverse, ont eu 20 millions de chômeurs supplémentaires en huit semaines.
Maintenant que nous avançons dans la reconstruction d’une économie abîmée par la crise, il nous faut aussi regarder au-delà de l’immédiat et penser de manière stratégique à la méthode, à comment nous souhaitons reconstruire.
Il est désormais évident, pour tous, que les risques liés au climat sont une source de risques financiers. Dans le cadre de notre mandat de stabilité financière, nous devons donc nous assurer de la résilience du secteur financier face à ces risques.
Ceci est au cœur de l’ambition du Network for Greening the Financial System (NGFS), lancé par la Banque de France fin 2017 et fort aujourd’hui de 66 banques centrales et superviseurs, qui a déjà accompli un travail remarquable.
La Banque de France et l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) sont déterminées à mettre en œuvre, dans la conduite de leurs missions, les recommandations du Network for Greening the Financial System (NGFS). La Banque de France publie désormais annuellement un rapport d’investissement responsable et nos équipes travaillent activement à la réalisation d’un stress test « climatique », qui sera conduit au 2e semestre 2020 avec les banques et les assurances volontaires.
Se pose alors la question d’une relance verte de nos économies. Faire ce choix revient en premier lieu aux gouvernements. Mais il est pleinement du ressort du système financier de saisir cette opportunité pour amorcer la transition vers un modèle bas-carbone et plus résilient. C’est notre modèle environnemental.
La gravité de la situation économique actuelle liée à la crise du COVID-19 suscite des débats collectifs importants sur les causes et remèdes à y apporter. Il est donc essentiel que les citoyens disposent des clés pour une compréhension éclairée des défis économiques de la reprise et des enjeux de société qu’ils emportent.
La Banque de France, en tant qu’opérateur national en matière d’éducation financière, a pris pour mission d’apporter au grand public et aux entrepreneurs, via de l’information ou de la formation neutre, gratuite et accessible, une meilleure compréhension des mécanismes et services financiers, ainsi que des opportunités et des risques qui y sont associés. Elle facilite donc pour chacun la prise de décisions financières conformes à ses intérêts, permet de mieux se prémunir contre les arnaques financières mais aussi de savoir vers qui se tourner en cas de difficultés. C’est pourquoi favoriser les compétences économiques, budgétaires et financières est plus que jamais utile, tant au niveau individuel que collectif, pour favoriser la résilience de la situation des ménages et des entreprises dans la période de crise que nous traversons. L’éducation financière permet aussi de mieux faire connaître, pour les entrepreneurs, la médiation du crédit ou, pour les particuliers, les dispositifs d’inclusion financière. Elle lutte ainsi contre les inégalités.
Dans un monde incertain, bouleversé, disruptif, la défense de notre modèle social, la lutte contre les inégalités, la préservation du climat et la promotion de l’autonomie personnelle grâce à l’éducation et la connaissance sont, pour moi, les bases d’un capitalisme responsable et les exigences autour desquelles doit s’articuler notre «modèle européen » qui fait notre force.
par François Villeroy de Galhau