La responsabilité est-elle une affaire de génération ?
Interview | Vendredi 16 avril 2021, Jean-Claude Le Grand, Directeur Général des Relations Humaines de l’Oréal, est venu échanger et débattre avec les participants de notre dernier « talk du capitalisme responsable ». Autour du thème « la responsabilité est-elle une affaire de génération », il a, au cours d’un débat constructif et humaniste, souligné que « la responsabilité est ressentie par chaque génération mais exprimée de manière différente. La responsabilité ne sépare pas, elle fédère les millenials et les seniors. »
Jean-Claude Le Grand répond ici à toutes les questions que vous vous posez sur les exigences des jeunes générations en matière de responsabilité, sur les actions à mettre en œuvre en entreprise pour sensibiliser toutes les générations aux sujets environnementaux, sociaux et de gouvernance…
Remarquez-vous une appétence plus forte des jeunes générations envers les sujets de responsabilité des entreprises, notamment lors des questions posées par les candidats en entretien ? Avez-vous fait évoluer vos méthodes de recrutement, en dehors des chemins traditionnels ?
La responsabilité est un sujet qui concerne tout le monde, et ce, quelle que soit la génération. C’est aujourd’hui même un prérequis avant de se décider à rejoindre ou non une entreprise. Pour les générations précédentes, ce sujet n’était pas aussi prégnant car les préoccupations n’étaient pas les mêmes. Les réponses concrètes que des sociétés comme L’Oréal cherchent à apporter, notamment au travers de nos programmes Sharing Beauty With All et maintenant L’Oréal pour le Futur, sont très attendues par les candidats. Ce sont des preuves tangibles importantes.
Sur ces sujets, nous rendons publics nos progrès, nos engagements, nos chantiers, nous nous engageons aussi dans des alliances avec d’autres acteurs économiques ou avec les pouvoirs publics pour accélérer notre transformation.
Comment, en interne, sensibilisez-vous les 4 générations qui composent le groupe aux sujets environnementaux, sociaux et de gouvernance ?
La question ici est celle du lien entre les générations. A cause… ou grâce à la crise sanitaire que nous traversons, nous avons encore renforcé nos initiatives en matière de formation à distance. Preuve de cet appétit exprimé par nos collaborateurs – quelle que soit la génération – à se former, notre partenariat avec Coursera. Les 12 000 cours/licences que nous avions acquis en 2020 ont été consommés dès le mois d’avril 2020. La formation est donc la condition sine qua non pour sensibiliser les 4 générations à l’ensemble des sujets : environnementaux, sociaux ou de gouvernance.
Nous nous inscrivons dans la même logique que celle que nous avons mise en place auparavant pour former, « upskiller » nos collaborateurs au digital. Nous donnons à tous l’opportunité de s’ouvrir à plus de connaissances, et pour les métiers qui requièrent une expertise particulière nous proposons des formations plus pointues. La clé ? la curiosité !
Vous dites que les jeunes générations portent plus fort et plus haut ces convictions : comment se place l’entreprise entre convictions, recrutement et pressions actionnariales ?
En effet, si toutes les générations sont concernées par ces sujets, les jeunes générations portent plus haut le discours, mais je ne crois pas à la vertu de la radicalisation des points de vue ou des opinions. Car selon moi, l’entreprise n’a pas à réconcilier de contradictions entre responsabilité, stratégie de recrutement et attentes des actionnaires. Au contraire, il n’y a pas de performance sans performance extra-financière !
Nous sommes engagés dans une double excellence : financière et extra-financière en même temps, sans les opposer. Un business durable est celui qui délivre une performance financière à court et long terme, d’une manière qui génère de la valeur positive pour la société et qui opère dans les limites planétaires. Un beau challenge que nous sommes prêts à relever, toutes générations confondues chez L’Oréal !
Au sujet du reverse-mentoring : accessible à tous les niveaux de poste ? Pourrions-nous avoir plus de détails sur son fonctionnement ?
Le reverse mentoring fait partie des méthodes agiles, il s’agit d’un mentorat inversé où le senior est coaché par un junior, qui dispose d’une expertise métier. Nous l’utilisons dans certains métiers qui nécessitent une évolution très rapide des compétences, comme en digital par exemple.
Avez-vous des indicateurs permettant d’établir l’importance que vos salariés et parties prenantes accordent à la responsabilité de l’entreprise ? Et si les différents « combats » que vous menez sont en accord avec leurs attentes ?
En interne, nous mettons en place une enquête annuelle qui permet à nos collaborateurs de s’exprimer sur un certain nombre de sujets et ainsi en retour, nous pouvons évaluer leur appréciation de nos avancées sur les sujets stratégiques et mettre en place des plans d’action très concrets sur les progrès qui restent encore à accomplir.
Nos équipes sont aussi très attentives à comprendre les notations externes qui analysent nos résultats en terme environnementaux, sociaux ou de gouvernance comme le Carbon Disclosure Project (CDP), Equileap, Vigeo, Sustainalytics etc.
Vous dites que la responsabilisation est l’affaire de tous : comment vos dirigeants ainsi que vos produits/ votre marque incarnent-ils ces valeurs ?
Nos performances extra-financières sont exemplaires et l’ensemble de nos marques sont engagées en faveur d’une beauté plus durable, plus responsable. Nous avons atteint l’essentiel des objectifs ambitieux que nous nous étions fixés dans le cadre de notre premier programme de développement durable Sharing Beauty With All. Nos efforts sont reconnus et des experts indépendants nous placent en tête des classements en matière d’environnement, d’éthique, de diversité et d’inclusion.
Au printemps 2020, nous avons franchi un nouveau cap dans notre engagement environnemental et sociétal avec le programme L’Oréal pour le Futur, qui vise à répondre aux grands défis de la planète et ouvre la voie à un avenir plus inclusif et plus durable.