Allocution d’Hervé Hélias | Grands Prix de l’Assemblée Générale et de la Mixité 2022
« Va-t-on vers un capitalisme plus humain et plus durable ? C’était le thème d’un atelier de la Cité de la Réussite qui s’est tenu il y a une dizaine de jours, animés par des étudiants majoritairement de Sciences Po.
Aujourd’hui, quand on aborde la notion de développement durable, les jeunes générations se questionnent. Le capitalisme ou notre modèle actuel de société sera-t-il en mesure de répondre aux défis majeurs de la transition climatique et de la lutte contre les inégalités sociales ?
Le capitalisme en France, tel qu’on l’a vécu au cours des dernières années, n’est pas un modèle sauvage qui a été purement orienté sur le profit.
A titre d’exemple, Mazars ne serait pas dans 92 pays, ne compterait pas 31 000 collaborateurs si, à la fin des années 80, nos premiers associés et en particulier notre fondateur Monsieur Mazars n’avaient pas fait le choix de donner son cabinet à ses associés, donc de renoncer au profit qu’il aurait pu tirer d’une vente à un cabinet anglo-saxon. C’est un acte fondateur d’entreprise et de renoncement au profit.
Un autre exemple mérité d’être cité, celui de Pierre Fabre. Monsieur Fabre, lorsqu’il est décédé, a fait don de son entreprise à une fondation qui – aujourd’hui – fait de la recherche médicale en Afrique. Par ailleurs, on peut aussi souligner que 95% des salariés dans le monde sont actionnaires de la société.
Il s’agit ici de deux excellentes illustrations représentatives d’un capitalisme responsable.
De nombreux autres exemples ont été cités lors des Rencontres du Capitalisme Responsable parmi lesquels l’engagement de Monsieur Perrier, président d’un des plus grands asset manager mondiaux, en faveur d’un capitalisme plus responsable et ses missions conduites pour le gouvernement français qui montrent la voix. Ou encore, les quatre entreprises lauréates des Grands Prix de l’Assemblée Générale et de la Mixité 2022, Schneider Electric, FDJ, Michelin, L’Oréal, qui témoignent du fait que le nouveau capitalisme ne consiste plus simplement en une recherche du profit à court terme. Bien qu’elle soit toujours présente, il s’agit aussi pour les entreprises de prendre davantage en considération les limites de nos ressources naturelles, les enjeux climatiques, les enjeux de développement des individus qui sont dans nos entreprises, les enjeux d’inclusion. Ce dernier point a été particulièrement évoqué ce matin sous l’angle de la mixité mais il existe de nombreuses autres formes d’inclusion qui nécessitent qu’on y travaille en profondeur. Enfin il faut également tenir compte des enjeux de réduction des inégalités sociales.
Toutes les bonnes pratiques et avancées évoquées ce matin me font dire que nous allons dans la bonne direction.
Mais, comment pourrait-on aller plus loin, en faire plus ?
Le premier objectif serait de mieux rendre compte. Il y a toujours ce débat – en particulier dans le monde de la finance – autour du greenwashing. Il faut mettre en place des indicateurs RSE indiscutables. Un certain nombre de projets en cours vont demander aux entreprises de fournir davantage d’information tels que :
- La taxonomie
- La SFDR pour les entreprises financières
- La CSRD votée par l’UE la semaine dernière.
Quelques précisions sur ce dernier point. 55 000 entreprises en Europe vont devoir – à partir de 2025 – faire un reporting d’un ensemble de KPI normés. Tout un travail de normalisation comptable est mené à marche forcée pour permettre un reporting incontestable et irréprochable. Ce afin de clore le débat sur le greenwashing. Beaucoup de ressources vont être nécessaires et j’appelle les jeunes à s’engager à nos côtés dans cette transformation.
Le second objectif évoqué ce matin lors d’une table-ronde est un meilleur partage de la valeur. Sujet d’actualité qui fait lui aussi débat et ajoute au scepticisme de la capacité de notre modèle de capitalisme à devenir véritablement durable.
Le partage de la valeur n’est pas seulement le rapport entre capital et travail. Celui-ci passe aussi bien par la rémunération des dirigeants que par la manière de payer ses impôts. Comment redonne-t-on à la société ? Comment redonne-t-on à des associations ? Comment redonne-t-on à des fondations ? C’est un partage plus global qu’il faut aujourd’hui considérer.
Enfin, un sujet central est celui du ratio d’équité et de la rémunération des dirigeants. Sur ces aspects bien précis du partage de la valeur, de nombreuses améliorations doivent être opérées.
Le troisième objectif qui me tient tout particulièrement à cœur est la question de la réduction des inégalités, un problème sociétal de fond qui devient majeur. Le monde associatif est – j’en suis convaincu – une des solutions les plus importantes pour lutter contre les inégalités sociales.
Parce les pouvoirs publics ne vont pas pouvoir tout faire, la construction de partenariats entre les entreprises et le monde associatif est essentielle. Ces associations – très engagées, sur le terrain – ont, aujourd’hui, foncièrement besoin de compétences, d’argent, et des réseaux des entreprises notamment de leur capacité de fund raising. C’est sur ce point spécifique que notre action compte et sur lequel il nous faut travailler pour les accompagner.
Pour clore cette allocution, je souhaite renouveler mon appel à la jeune génération. Devenez des acteurs du changement, engagez-vous à nos côtés dans cette transformation majeure qui est en marche. Les dirigeants d’entreprise sont sincères dans leur démarche mais ont besoin de ressources, de vous. »